Violence scolaire ecole
Une fatalité tolérable, vraiment ??

On parle souvent de la violence à l’école comme d’une fatalité.

Un phénomène qui aurait toujours existé ou contre lequel on ne pourrait pas faire grand-chose.

Le plus confortable est encore de nier son existence.

Et quand on décide de s’y attaquer, la solution simple qui vient à l’esprit, c’est d’exclure les élèves agressifs ou perturbateurs.

Vous savez à quel point je suis peu convaincue par cette approche.

Alors, il y a quelques semaines, lorsque j’ai rencontré Florence Vasseur, professeur de théâtre et de Biodanza, je me suis réjouie de l’entendre détailler une expérience qu’elle a conduite dans le Val de Marne pour lutter contre la violence à l’école.

Une expérience positive et qui a donné de réels résultats !

Magali : Vous avez animé des ateliers en école primaire pour lutter contre la violence à l’école ?

Florence Vasseur : J’ai effectivement eu la chance d’intervenir en périscolaire pendant plusieurs mois dans une école primaire.

L’objectif était d’utiliser la Biodanza pour lutter contre la violence à l’école. Et donc, d’intégrer dans le groupe quelques enfants « ciblés » dont le comportement était agressif envers les autres.

J’ai proposé de travailler autour du thème « De quoi a-t-on besoin pour être heureux ? ». J’ai élargi l’approche initiale de la Biodanza, inspirée en cela par les travaux de Jacques Salomé, qui parle des 5 besoins relationnels humains :

  • besoin de se dire,
  • besoin d’être entendu,
  • besoin d’être reconnu (tel que je suis),
  • besoin d’être valorisé,
  • besoin de rêver.

Magali : Comment se déroulaient ces ateliers ?

Florence Vasseur : Donc, au début, je proposais aux enfants (une vingtaine, et j’avais avec moi deux autres adultes de la mairie pour m’assister) de me dire ce dont ils avaient besoin pour être heureux. Selon le principe du brainstorming, je notais toutes leurs idées au tableau.

Puis je leur proposais de les regrouper par « familles ». Et c’est ainsi que, une fois passée la phase d’expression des besoins matériels (besoin d’argent, de nouveaux jeux, jouets…) et des besoins de base (besoin d’avoir un toit, de se nourrir…), nous sommes arrivés aux besoins relationnels.

Je leur ai proposé ensuite de les danser, ou plutôt de les vivre ensemble à travers des jeux. Car quand on parle de danse, on perd tous les garçons et on n’a plus que des filles ! Il faut faire attention aux mots qu’on emploie…

Magali : Qu’est-ce qui a fait le succès de ces ateliers pour répondre à la violence à l’école ?

Florence Vasseur 3 Biodanza
Florence Vasseur, professeur de théâtre et de Biodanza

Florence Vasseur : Pour moi, la valeur de la Biodanza qui passe par l’expression corporelle, et des temps de partage et d’échange par les mots, c’est qu’il ne s’agit pas d’avoir un discours moral autour de valeurs, aussi nobles soient-elles, mais de donner à vivre des expériences, qui vont peu à peu permettre à chacun de développer une conscience éthique.

Le respect de la vie ou de l’autre, l’empathie, ne peuvent pas s’enseigner comme des principes moraux. Il faut qu’ils surgissent comme une évidence à partir de l’expérience vécue.

C’est toute la force du principe de vivencia en Biodanza : donner à vivre des moments de partage, de respect, de feed-back, d’écoute, de réciprocité… pour renforcer la croissance d’une éthique personnelle chez chacun.

L’expérience s’inscrit dans la mémoire (imprinting). Les expériences de Biodanza sont exclusivement positives et dans une démarche de respect de soi, de l’autre et de la vie.

Le fait de donner à vivre à un groupe, régulièrement, des vivencias positives, va permettre de nourrir des identités saines, et de transformer la qualité relationnelle des membres de ce groupe.

Et ce par et à travers l’expérience vécue de chacun, facilitée par l’animateur. Pas par la transmission de mots d’un professeur à un groupe d’élèves…

Magali : Quels changements avez-vous noté chez les enfants au fil des mois ?

Florence Vasseur : Progressivement, en apprivoisant le lien avec chaque enfant et avec le groupe, je suis passée d’exercices peu impliquants (issus du théâtre par exemple) à des jeux de groupe de Biodanza (pour favoriser la rencontre avec l’autre, le vivre ensemble, le prendre soin, l’empathie…) sur des musiques variées, dynamiques ou lentes, pour aller vers des exercices plus forts au niveau de l’expression de l’identité, ou de l’affectivité.

Au fil des séances, j’ai vu des comportements changer, évoluer.

Un enfant qui était toujours seul a commencé à se faire des amis. Une petite fille qui tapait les autres et ne respectait aucun cadre (elle adorait être tout près de moi et était très affectueuse, car en manque d’affection je pense…) a progressivement respecté le cadre et trouvé sa place sans avoir à déranger sans arrêt les autres et le groupe…

Et pour tous les autres, ceux qui apparemment n’avaient pas de « problème » ou de comportement « inadéquat », ceux-là venaient avec une telle joie à l’atelier ! Quand je traversais la cour de récréation, ils criaient tous mon nom dès qu’ils me voyaient et se précipitaient vers moi… comme vers une bouffée d’oxygène !

Magali : Selon vous, pourquoi ces ateliers ont été bien accueillis par les enfants ?

Florence Vasseur : C’est simple, je leur offrais un espace de liberté.

Une liberté cadrée (Toujours le même cadre : être libre de faire ou ne pas faire, tant que tu ne déranges pas le cadre…), mais une liberté d’être, de vivre, de ressentir, de dire…

Une liberté de se dire, d’être entendu, reconnu, valorisé, le droit de pouvoir rêver ET la possibilité de s’écouter les uns les autres, et de se découvrir aussi les uns les autres, autrement !

Magali : Qu’est-ce que les enfants ont appris pendant ces ateliers ?

Enfants heureux école
De quoi avez-vous besoin pour être heureux ?

Florence Vasseur : Mon approche, qui mélange temps d’échange verbal, jeux de théâtre et Biodanza s’inscrit dans une seule dynamique, une seule intention : apprendre à vivre (ce qui devrait être le but de tout projet éducatif).

Apprendre à vivre pour soi, avec soi-même, et avec les autres !

Apprendre à exprimer sa joie d’exister, à exprimer toutes ses émotions (colère, tristesse, peur…). A s’écouter, à se découvrir. A se respecter.

A se vivre, à s’aimer tels que l’on est, chacun. A vivre en intelligence affective avec les autres.

Les enfants ont appris un peu de tout cela… Ou plutôt, ils ont pu expérimenter un peu de tout cela, avoir un espace d’expérimentation à eux, pour sentir les choses, les vivre, en eux et les uns avec les autres.

L’écologie relationnelle, je pourrais en parler des heures, c’est mon dada et mon cheval de bataille, que ce soit avec la Biodanza ou mon autre métier de Conseillère Conjugale et Familiale !…

Magali : Malgré son succès, cette expérience n’a pas été reconduite, ni étendue à d’autres écoles, ce que je trouve bien dommage… Quelle pourrait être la suite ?

Florence Vasseur : Moi aussi, mais je n’ai pas renoncé ! Quand une porte se ferme, une autre s’ouvre, ailleurs…

Mairies, Centres Sociaux, Maisons des parents, Ecoles… Je cherche à rencontrer des organismes partenaires afin de pouvoir mettre en place d’autres actions, auprès des enfants, mais aussi des enseignants, des animateurs…

Car j’ai également le désir de transmettre, de passer la main.

Transmettre le savoir-faire que j’ai acquis depuis 30 ans, pour donner confiance et place au savoir-être des nouvelles générations en leur transmettant des outils qui mettent la vie au centre. Cette formation s’appelle « 3 M : Musique-Mouvement-Mot ». Elle est un mélange de tous mes savoir-faire croisés (comédienne, conteuse, professeur de théâtre, de Biodanza, metteur-en-scène pour enfants…).

Comment ça se passe chez vous ?

Vos enfants ont-ils bénéficié de ce type d’ateliers à l’école qui apprennent à chacun à trouver sa place par l’expérience plutôt que par la leçon d’éducation civique ?

Avec quels résultats ?

S’agissait-il d’initiatives ponctuelles ? Ou au contraire d’ateliers reconduits chaque année pour faire évoluer durablement le climat au sein de l’école ?

Partagez votre expérience dans les commentaires !

 

Crédit photo : Helder AlmeidaMonkey Business

5 Comments on Violence à l’école : et si on essayait enfin des réponses positives et efficaces ?

  1. Bonjour,
    Vivre en intelligence affective avec les autres. Cela me fait rêver.
    Au collège, certains professeurs motivés proposent des ateliers théâtre pendant la pause déjeuner.
    Mon fils, qui a pourtant fait cinq ans de théâtre à l’extérieur, refuse d’y aller.
    Le climat global au collège est plutôt au clash qu’à l’intelligence et à la bienveillance.
    Connaissez-vous des ateliers de Biodanza qui aient fonctionné en collège ou en lycée ?
    Carole.

    • Bonjour Carole,

      Avec son expérience, votre fils aurait beaucoup à apporter aux ateliers théâtre du collège, comme c’est dommage que le climat ne s’y prête pas 🙁

      Je vais demander à Florence Vasseur si elle a connaissance d’ateliers de Biodanza animés en collège ou lycée !

      A bientôt,
      Magali.

      • Bonjour Magali,

        Merci pour votre point de vue, que je transmettrai à mon fils.
        Je lui ai dit régulièrement « Tu étais vraiment bon au théâtre, c’était un plaisir de te voir évoluer sur scène ».
        Après deux ans d’interruption, il a décidé de reprendre le théâtre l’an prochain, mais à l’extérieur du collège. On verra pour le lycée, et qui sait, il y aura peut-être d’ici là des ateliers de BioDanza 😉 .

        Carole.

  2. Bonjour
    1) Dominique HUBERT enseignante en Belgique relate son action dans un livre pour « S’épanouir à l’école, c’est possible , vivre un e éducation biocentrique au collège et au lycée » Edition http://www.chroniquesociale.com
    2) Je pratique la Biodanza dans un groupe où les plus jeunes paraissent avoir 20 ans et les plus vieux, bien 70 ans. C e qui est bon pour les enfants, pour qu’ils trouvent comment se faire du bien ,(re) contacter leur joie de vivre, faire fleurir le bonheur en eux, allumer des étoiles dans leurs yeux, rayonner, … l’est aussi pour l’enfant en chacun de nous quelque soit son âge.
    Pour savoir si cette affirmation est également valable pour vous. aller sur le Web à « Biodanza » pour savoir où il y a un groupe près de chez vous. Contacter éventuellement les écoles de biodanza pour ne pas rester dans l’ignorance d’ un groupe local qui n’aurait pas encore de site. Régulièrement , ils proposent une biodanza de découverte.

    • Bonjour Bruno,

      Un grand merci pour votre partage d’expérience !!!

      A bientôt sur Parents du 21ème siècle,
      Magali.

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