Monde maison enfant
La gravité du monde s’invite à la maison

J’ai découvert la terrible série d’attentats du 13 novembre 2015 le lendemain matin, à mon réveil.

Bien vite, ma fille comprend que quelque chose ne va pas dans cette journée qui s’annonçait comme une chouette journée de vacances au bord de la mer.

Papa et maman ont l’air tristes, préoccupés, ils échangent des nouvelles qu’elle ne comprend pas. Le temps passe et on est toujours à la maison au lieu d’être à la plage.

A ce moment là, je ne vois pas comment faire l’impasse et ne pas lui parler de ce qui s’est passé à Paris. La maintenir dans l’ignorance me semble être angoissant pour elle : mieux vaut savoir ce qui se passe, même le plus terrible, que d’appréhender et de redouter une menace vague face à laquelle elle serait impuissante.

Dans cette mission délicate, à laquelle des millions de parents ont été confrontés depuis samedi, je dois dire que je suis grandement aidée par le travail fait au quotidien à l’école de ma fille. Les enfants y apprennent une éthique de base : prendre soin de soi, prendre soin des autres, prendre soin de son environnement.

Toutes les situations du quotidien sont prétexte à intégrer cette éthique : deux enfants qui convoitent le même jouet dans la classe, un enfant qui tombe dans la cour de récré, laisser une table propre à la fin du goûter…

Cette éthique est raccourcie sous une formule simple : Melawati way. Melawati étant le nom du campus où ma fille va à l’école. Une autre formule qui revient souvent et qui accompagne le Melawati way : pour régler un conflit, pour obtenir quelque chose, pour formuler une demande, pour remercier… toujours utiliser des mots. 100 fois par jour, la maîtresse le rappelle aux enfants : « dis-le avec des mots ».

En moyenne section maternelle, ma fille a bien intégré cette éthique et nous dit souvent au quotidien de son comportement, ou de comportements dont elle est témoin : « ça c’est Melawati way ! » ou « ça c’est pas Melawati way ! ». Elle sait aussi que certaines personnes ont appris et intégré cette éthique de vie et que cela mérite respect et admiration.

Elle sait que d’autres personnes n’ont pas appris cette éthique, que cela crée de la souffrance chez elles et chez les autres, et que ce n’est pas irréversible : ceux qui pratiquent cette éthique peuvent la transmettre à ceux qui ne la connaissent pas encore.

Donc au moment de lui parler des attentats, j’ai une base claire et solide, un langage commun avec ma fille. Je ne peux en remercier assez l’école. Voilà ce que je lui ai dit :

« Hier soir, des hommes que l’on appelle des terroristes, ont tué beaucoup de personnes à Paris. Ces hommes n’ont pas appris Melawati way. Ils ne savent pas utiliser des mots quand ils ne sont pas d’accord. Ils ne savent qu’utiliser la violence. Alors papa et moi, nous sommes très tristes et préoccupés de ce qui s’est passé ».

Voilà, c’est tout. Pour elle, ça semble clair et suffisant avec cette explication.

Pour aller plus loin

Paix pour Paris Petit PrinceMa fille est encore petite, donc elle ne se pose pas encore de questions sur ce qu’est la mort, sur ses conséquences pour les proches endeuillés, ou sur ce qu’est une action terroriste.

En complément, voici 4 conseils reçus de l’école au lendemain des attentats :

1. Si les enfants veulent vous parler de ce qui s’est passé, tenez-vous en aux faits et évitez les spéculations

2. Accueillez et validez toutes les peurs et émotions qu’ils expriment. Si vos enfants sont terrorisés, rappelez leur qu’ils sont en lieu sûr.

Plus facile à dire de Kuala Lumpur que de Paris, surtout si vous craignez vous-même pour votre sécurité 🙁

Pourquoi pas alors les rassurer en vous appuyant sur toutes les mesures de sécurité qui sont prises pour nous protéger ?

Sans mentir en les présentant comme infaillibles, vous pouvez parler de l’extraordinaire dévouement, du courage de tous les hommes et de toutes les femmes qui travaillent de jour comme de nuit à assurer notre sécurité.

3. Si vos enfants demandent ce qu’ils peuvent faire, rappelez-leur que la gentillesse est un moyen accessible à tous pour rendre notre monde meilleur. Encouragez-les avec une question comme « quelles actions peux-tu réaliser pour apporter plus de gentillesse à cette journée ? »

A mon sens, c’est l’antidote la plus puissante à ce qui s’est passé vendredi : nous rappeler et rappeler à nos enfants qu’à côté de la noirceur du monde, il y a aussi partout de la générosité, des héros, de la solidarité, de la gentillesse. Il suffit de déplacer le projecteur pour que brille la face lumineuse de l’humanité.

4. N’hésitez pas à demander de l’aide. A l’école de ma fille, il y a des counselors qui sont formés pour cela, dommage que ça n’existe pas en France. Vous pouvez vous appuyer sur beaucoup d’autres ressources : informations sur Internet, discussion avec des amis qui sont eux aussi parents, psychologues…

Pour aller plus loin, je vous propose une liste de très bonnes ressources compilées ces derniers jours par mon amie Priscille :

Préparer nos enfants à la minute de silence de lundi, Isabelle Filliozat : un très beau texte que vous pourrez utilement reprendre avec vos enfants dans toutes les situations où votre enfant est exposé à la souffrance du monde.

Mardi 17 novembre, les Maternelles sur France 5 ont consacré une émission spéciale aux attentats, disponible en replay. En complément, l’émission rediffuse une interview en 3 minutes de Serge Tisseron sur les Maternelles, suite aux attentats de janvier

Attentats de Paris, que dire aux plus petits ? Pomme d’Api

Editions spéciales attentats du 13 novembre à Paris du Petit Quotidien, à télécharger gratuitement

J’en retiens 4 messages clés :

1. Parlez avec vos enfants de ce qui s’est passé : que vous le vouliez ou non, ils en seront informés par leurs copains à l’école, par la télé, Internet…

2. Adaptez le niveau de détail à l’âge : explication simple pour les petits, plus détaillée pour les plus grands.

3. Accueillez les émotions et le point de vue de votre enfant, même si certaines craintes ou interprétations vous paraissent infondées. Partagez votre point de vue, votre ressenti, vos réponses à leurs questions. Bref, engagez une vraie discussion dans laquelle votre enfant est un interlocuteur que vous écoutez avec intérêt.

4. Donnez à votre enfant des outils pour se sentir en lien avec les autres et capable d’une réponse positive, solidaire à ce qui s’est passé : dessin, méditation, action symbolique avec vous, avec ses copains ou à l’école…

Appel à l’action

Solidarité Paris EnfantsJe suis terriblement peinée que parmi les victimes des attentats, beaucoup étaient parents de jeunes enfants. Ces enfants vont avoir besoin de notre aide, de sentir la solidarité d’un pays pour peu à peu retrouver leur joie de vivre.

Il m’est venu une idée ce matin : et si nos enfants réalisaient des dessins, écrivaient des lettres pour les envelopper de leur gentillesse ?

Et si vous proposiez à l’enseignant de votre enfant d’en faire un projet de classe ?

Qu’en pensez-vous ? Si vous êtes partants, dites-le moi dans les commentaires.

De mon côté, j’ai écrit ce matin en ce sens à la direction de l’école de ma fille, j’attends leur réponse.

 

Crédit photo : Fotolia, Le Petit Prince officiel (page Facebook), Zlatko Vickovic

2 Comments on Comment j’ai parlé des attentats du 13 novembre avec ma fille

  1. Magali,
    very interesting. I went to vent to one of the counselors because not only the kids were upset and confused due to the attacks in Paris, I was as well. I had no one to express my fear, anger and hopelessness, as the others are not French walking every Summer or through out the year on those streets, going to that theatre, eating at that same restaurant..it is too close to home to feel any comfort. Bon courage, liking the blog so far!

    • Cata,

      Thanks for sharing your experience, it has been such a shock for all of us 🙁

      Waouh, it takes a lot of courage, especially as parents, to sometimes say « I feel overwhelmed, I don’t know how to handle that situation. And I don’t know how to talk about it with my kids ». Going and seeing the counselor to ask for help was a great thing to do.

      Did she give you additional tips that you’d like to share with other parents?

      Magali.

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