Cette semaine, j’ai le plaisir d’accueillir Steven, du blog Les Maths en Tongs. Quoi, des maths sur Parents du 21ème siècle ? Pitié, pas ça !
Ne partez pas tout de suite ! Je vous fais une promesse : vous aurez beau tourner et retourner l’article qui suit dans tous les sens, vous n’y trouverez pas une équation.
Alors, rassuré(e) ?
Si j’ai invité Steven à nous parler de maths aujourd’hui, c’est parce que j’ai tout de suite adhéré à sa façon pragmatique et cool d’envisager cette matière. Et parce que nous partageons le même objectif : qu’en faisant des maths, votre enfant n’apprenne pas (bêtement) par coeur des théorèmes qui seront vite oubliés. Mais que cette matière soit le tremplin pour développer sa créativité, son esprit critique, sa capacité à coopérer – j’ai pas compris, tu veux bien m’expliquer ? – son envie d’apprendre…
Bon, et aussi Steven a un doctorat en maths, donc il sait de quoi il parle 😉
Pourquoi allez-vous sauver votre enfant en lui évitant d’avoir peur des Maths ? Pour une bonne raison : les Maths sont un excellent support pour travailler la majeure partie des 6 attitudes de la réussite ! Il serait donc dommage de s’en priver…
Avant de vous montrer en quoi cette affirmation est vraie, je voudrais rassurer ceux que j’entends déjà me dire qu’ils n’aiment pas les Maths, ou qu’ils n’ont jamais été bons… Pas de panique, je ne vais pas parler de Maths dans cet article autrement qu’avec des mots ! Ce que je veux, c’est vous montrer ce que votre enfant peut apprendre à travers les Maths et comment vous pouvez l’aider à « recycler » sa peur des Maths pour la reconvertir en émotions positives qui vont le pousser vers la réussite.
C’est aussi ce que je m’efforce de faire passer, plus ou moins implicitement, dans les articles à destination directe des lycéens que j’écris sur le site « les Maths en Tongs » que j’ai fondé il y a quelques mois. Place aux Maths !
Un environnement épuré pour plus de clarté
Si je vous demande ce que sont les Maths pour vous, que me répondez-vous ? Que c’est la matière d’excellence qui va déterminer si votre enfant est intelligent ou non. Ou plutôt, que c’est la matière la plus difficile et que vous devez être particulièrement vigilant pour qu’il ne décroche pas. Ou encore, que c’est la matière à laquelle vous n’avez jamais rien compris et que vous ne saurez malheureusement pas l’aider.
La seule vraie question
En réalité, peu importe ce que cela représente pour vous. Aucune de ces descriptions n’est pertinente et on pourrait argumenter pendant des heures sans se mettre d’accord ! Soyons plutôt pragmatiques. La seule vraie question est : quelles attitudes votre enfant va-t-il pouvoir cultiver au travers des Maths, et pourquoi est-ce une matière idéale pour le faire ?
Et à ça, j’ai une vraie réponse : il va pouvoir renforcer sa logique, sa curiosité, sa capacité d’adaptation, son acceptation de l’échec et sa créativité ! En d’autres termes, il va pouvoir solidifier fortement des capacités essentielles à sa réussite. Dans la partie suivante, je vous donne les 3 piliers qui me poussent à l’affirmer. Mais avant cela, pourquoi les Maths rendent-elles cet apprentissage plus simple ?
L’avantage des Maths sur la réalité
La raison est que les Maths forment un environnement épuré qui contient peu de notions, peu de règles et où tout est bien défini et générique. Votre enfant peut donc travailler efficacement sans être submergé par la complexité de l’environnement dans lequel il le fait.
Pour prendre un exemple parlant, c’est comme travailler un mouvement spécifique de self-defense lors d’un cours encadré par un professeur, plutôt que d’essayer de travailler le même mouvement en situation réelle. C’est plus simple et même si ce n’est pas exactement la même chose, c’est utile. Même très utile.
Que vous aimiez les Maths ou non, vous ne trouverez cet environnement épuré dans aucune autre matière. Par conséquent, ne passez pas à côté et faites-en bon usage !
Un terreau fertile qui repose sur 3 Piliers
Vous l’aurez compris, je crois que les maths sont un support particulièrement efficace pour faire travailler à votre enfant des clés essentielles pour son futur. Selon moi, c’est la combinaison du cadre épuré dont je viens de parler avec les 3 piliers que je vais détailler dans cette partie qui engendre cela.
Je commencerai par le pilier le plus évident, celui auquel tout le monde pense en premier : les Maths sont basées sur la logique. C’est tout à fait vrai, et même si d’autres matières se prêtent assez bien à l’acquisition de la logique, ou pensée critique, les Maths restent le support parfait puisque tout y est bien défini.
Puis, je développerai les deux autres piliers qui, selon moi, sont au moins aussi importants que le premier. J’aurais même tendance à dire qu’ils le sont encore plus car d’une part, ils vont permettre de travailler deux capacités plus directement utiles dans la vie. Et d’autre part la logique ne mène pas loin sans ces deux autres piliers. Je parle du fait qu’en Maths il faut construire des raisonnements à partir de peu de choses et qu’on peut savoir très vite et avec certitude quand on se trompe. Mais commençons par la logique.
Pilier 1 : La logique est la règle
Aucun doute, les Maths et la logique sont intimement liées. Tout exercice de Maths fait travailler la logique. Même un calcul tout simple, pour lequel on se doit de suivre les règles de priorités entre opérations, oblige à travailler la logique : une addition passera toujours après une multiplication. Faire l’inverse c’est briser la logique mathématique.
Plus généralement, et c’est souvent comme cela qu’est vue la logique, résoudre un exercice c’est créer des liens logiques qui permettent, à partir des éléments de l’énoncé, d’arriver au résultat demandé. Et ces liens logiques doivent suivre des règles mathématiques qui ne sont pas discutables.
C’est une chance car cela veut dire qu’il n’y a pas de place pour la subjectivité. Autrement dit, quand c’est juste, c’est juste ! L’intérêt est que votre enfant peut travailler dans un environnement déterministe (dans lequel le hasard n’existe pas) et bien moins complexe que le monde réel. Il pourra donc exercer sa pensée critique sans être parasité par une multitude d’éléments extérieurs non pertinents.
Pilier 2 : Raisonner à partir de (presque) rien
Cet environnement mathématique ultra-simplifié implique aussi que le nombre de briques de base (notions, outils, théorèmes) à utiliser dans les raisonnements est faible. Je dirais même qu’il est minime comparé aux éléments du monde qui nous entoure et que votre enfant doit appréhender quotidiennement.
Pour réussir en Maths, votre enfant doit construire des raisonnements valides (selon les règles qu’il a apprises) dans le monde restreint de ce qu’il sait des Maths. Autrement dit, il doit apprendre à s’adapter et à s’en sortir dans un univers différent, chaque exercice étant différent, avec le « peu » qu’il sait. Il doit donc oser et être particulièrement créatif !
Les Maths et le « par cœur »
Par ailleurs, il y a une deuxième conséquence plus triviale au fait qu’il y ait peu de briques de base : il n’y a que très peu de « par cœur » ! Si vous comparez les cours de Maths à ceux d’histoire par exemple, c’est évident. Et ça devrait être un argument pour le motiver à étudier les Maths. Mais vous allez me dire qu’il est rare que les enfants perçoivent ce côté-là des Maths. Vous avez raison, mais pourquoi ?
La raison est qu’on privilégie trop souvent la mémoire au raisonnement. On préfère donc enseigner les Maths en donnant des listes de formules, toutes plus horribles les unes que les autres, au lieu de donner les 2 formules de bases qui vont engendrer toutes les autres.
C’est terriblement contre-productif de mon point de vue car d’une part, on noie les enfants dans une tonne d’informations qui leur fait peur. Et d’autre part, on ne les fait pas travailler les techniques de base pour retrouver les autres formules alors que ça leur permettrait de bien comprendre et de s’approprier ces notions. Si vous voulez un exemple qui va vous parler, lisez ou écoutez l’article que j’ai écrit pour expliquer que, malgré mon BAC+8 en Maths, « les tables de multiplication, j’connais pas ! ».
Les conséquences de cette remarque toute bête peuvent être terribles car il est impossible de construire proprement des liens logiques entre des éléments qu’on ne comprend pas. Je vous invite donc à expliquer à votre enfant que le « par cœur » ne l’aide pas et qu’il est bien plus utile de savoir retrouver ce qu’on lui demande d’apprendre par cœur.
Pilier 3 : En Maths, on se trompe vite et bien !
J’en viens au troisième et dernier pilier. C’est à mon avis le plus important tout en étant celui auquel peu de gens pensent : en Maths, on échoue rapidement et de façon évidente !
On le sait, le système éducatif français n’aime, en général, pas l’échec. Et qui voudrait que son enfant soit en échec scolaire ? Personne ! Mais il y a échec et échec. Alors de quel échec je parle ici ?
Je parle de l’échec que votre enfant ressent quand il essaie de résoudre un exercice et qu’il n’arrive pas à trouver la solution. Et de ce point de vue-là, j’ai raison quand je dis qu’en Maths on sait très vite quand on se trompe et on peut en être sûr et certain. Là encore, c’est une chance dont il faut profiter.
Il y a très peu de situations dans la vie pour lesquelles on peut apprendre à échouer si « efficacement ». En général, il faut du temps pour savoir si nos choix mènent à des impasses. Et il n’est même pas toujours clair que ça en soit vraiment. Pourtant savoir rebondir positivement après un échec est une capacité primordiale pour réussir dans la vie.
L’avantage en Maths, c’est que plusieurs facteurs rendent ce processus rapide, certain et constructif. Tout d’abord rapide car quand on déroule un raisonnement et que celui-ci ne permet pas de trouver le résultat escompté, on le voit très vite. Ensuite certain car en Maths tout est bien défini et il ne peut pas y avoir de doutes sur la validité d’un résultat. Soit c’est juste, soit c’est faux. Enfin constructif car on sait toujours qu’il existe une solution au problème posé ! On sait même qu’il n’y a bien souvent pas qu’une seule manière d’y arriver. Et ça rend tout ce processus très efficace.
L’échec doit débrider votre enfant.
Pour être bien clair, c’est le seul fait de savoir qu’il y a une solution qui change tout. Il n’est plus question de gaspiller son énergie à chercher une solution qui n’existe peut-être pas. Bien au contraire, chaque nouvel essai augmente les chances d’arriver à la solution. Ainsi, on apprend immédiatement de son échec !
Une fois que votre enfant aura compris cela, il n’aura plus cette impression de travailler pour rien, sans voir ses notes augmenter. Il ne verra plus non plus d’intérêt à se brider (comme je le vois si souvent…) en utilisant des phrases du type « je dis peut-être une bêtise » ou « je suis pas sûr que ce soit ça ». Et si ça ne vient pas de lui-même, incitez-le à dire et à faire des bêtises souvent, rapidement et surtout, apprenez-lui à en tirer ses propres conclusions pour s’améliorer à chaque fois.
Tout ce processus lui permet de travailler à la fois sa combativité face à l’échec et sa créativité pour inventer un chemin alternatif à chaque fois qu’il se retrouve dans une impasse. Si vous mettez de côté le fait que je parle de Maths, vous voyez bien l’utilité de travailler ces attitudes, non ?
Pour aller plus loin
J’espère que ces 3 piliers ont apporté quelque chose à la vision que vous avez des Maths et que cela vous permettra de mieux les aborder avec votre enfant. J’ai essayé d’illustrer au mieux mon propos pour vous donner des pistes à explorer avec lui. Et pour aller un peu plus loin, je vais tout de suite vous donner deux petits trucs tout simples pour l’aider dans son apprentissage.
Comment débloquer toute cette puissance chez votre enfant ?
C’est donc le moment de mettre la main à la pâte ! Si votre enfant n’est pas naturellement attiré par les Maths, il va falloir le rendre curieux et l’inciter à « jouer » avec les Maths pour réussir en y prenant un certain plaisir. Voici 2 « exercices » à faire avec lui régulièrement et en vous impliquant à 100% !
1. Les maths sont présentes partout et tous les jours, servez-vous-en !
Les Maths sont tellement présentes autour de nous au quotidien qu’on ne s’en rend parfois même plus compte. Par exemple, elles sont le cœur du rendu graphique des jeux vidéo que vos enfants adorent. C’est aussi grâce aux Maths que l’on peut optimiser les trajets de livraison ou la consommation des moteurs comme je l’explique ici. Il faut donc utiliser tout cela pour attiser la curiosité de votre enfant.
Un seul mot d’ordre donc : Illustrer ! Il faut donner du sens à ce qu’il apprend, qu’il soit en primaire ou en Terminale. Peu d’enfants s’intéressent aux Maths pour les Maths, pour la beauté de la logique et ils ne sont pas à blâmer. Il faut donc leur rendre les Maths attractives à travers des exemples simples ou de petits jeux. Il existe des chaînes YouTube qui peuvent faire ce travail, comme celle de Mickaël Launay.
Malgré tout, je crois que c’est aussi un bon moment pour renforcer votre relation avec lui et qu’il vaut donc mieux que vous trouviez des activités à faire à deux. Par exemple, trouver un sujet qui le motive et pour lequel vous pourriez bricoler un objet avec lui. Il aime les oiseaux ? Fabriquez un nichoir avec lui. Mais faites-lui faire les plans sur le papier avec toutes les mesures avant de passer à l’action ! Ça le fera travailler la géométrie de façon naturelle et utile.
Il préfère la cuisine ? Pas de problème. Choisissez une recette de gâteau pour 6 et proposez-lui de calculer les doses pour 8, car mieux vaut trop que pas assez 🙂 ! C’est une façon gourmande de devenir à l’aise avec la proportionnalité.
Un dernier exemple avec les pourcentages car je connais bien des adultes qui en auraient besoin ! Pour lui faire comprendre ce qu’ils représentent, vous pouvez lui faire compter combien de semaines d’argent de poche il lui faudrait pour avoir l’objet dont il rêve au prix normal. Puis refaites-lui faire le même calcul avec 25% et 40% de réduction. La différence de temps sera beaucoup plus simple pour lui à assimiler que la différence de prix.
Bien sûr ce ne sont que des petits exemples et je fais confiance à votre créativité pour adapter cela à l’âge et aux hobbies de votre enfant. Vous devez chercher à faire travailler à la fois son sens logique et sa créativité. Le but est qu’il s’approprie des notions abstraites pour les faire devenir concrètes et que ça « lui parle » !
2. L’échec est toujours la voie la plus rapide vers la réussite !
Apprenez-lui à échouer et à se servir des impasses dans lesquelles il tombe. C’est la voie normale pour comprendre et réussir. Ce que je vous propose c’est de faire avec lui les exercices pour lesquels vous ne connaissez pas la réponse. Il vous donc faudra réfléchir en collaboration avec lui et travailler votre propre acceptation de l’échec ! Il n’y a pas de raison qu’il soit le seul à souffrir 😉
Et si vous connaissez la réponse, ne cherchez jamais à la lui faire trouver directement. Encouragez-le à suivre ce qu’il pense être la bonne voie, laissez-le se rendre compte de son erreur et aidez-le à comprendre ce qui ne va pas et à se corriger. C’est ce que je me force à faire avec mes élèves, comme vous pouvez le voir dans les 30 premières secondes de cette vidéo.
C’est très important ! Les Maths doivent devenir ce jeu où « essais, erreurs et corrections » sont les outils naturels de la réussite. Les bons élèves n’arrivent pas directement à la solution comme par magie, ils savent juste qu’elle existe et qu’ils finiront par la trouver. Votre enfant doit en être conscient lui-aussi, alors n’oubliez pas de lui rappeler tout le temps.
Un petit mot pour finir…
J’espère que cet article vous a plu et qu’il vous a permis d’élargir votre vision des Maths ! Je voudrais remercier Magali qui m’a laissé carte blanche et m’a ainsi permis de m’exprimer sur ma vision des Maths et sur les raisons qui m’incitent tous les jours à les enseigner sur mon site !
Au plaisir d’échanger avec vous et d’aider votre enfant à Réussir,
Steven, fondateur du site « les Maths en Tongs »
Crédit photo : Freepick
Cet article est très intéressant, merci Steven et Magali.
Je comprends mieux pourquoi mon fils de 12 ans et moi aimons les maths, et j’ai des idées pour aider mon fils de 15 ans à les aimer, au moins un peu, du moins à cesser d’en avoir peur, l’épreuve du Brevet approchant à grands pas 🙂
Merci Carole !
Oui, c’est hyper important de l’aider à avoir moins peur des Maths maintenant, avant qu’il ne rentre au Lycée. Les Maths de collège sont la vraie base solide à avoir pour réussir ensuite. S’il s’en sort pas déjà trop mal aujourd’hui malgré ses blocages, libérer sa peur l’aidera à réussir au Lvcée sans avoir à devenir fan des Maths 🙂
Et content d’entendre qu’il y a encore des jeunes qui aiment les Maths 😀 !